LES ORIGINES DE LA PLATEFORME
Au fil de leur action de médiation dans les quartiers populaires de la ville d’Angers, Les Libres Filmeurs ont
conscientisé des besoins sociétaux inédits en termes de consolidation des identités individuelles et collectives,
qu'elles soient humaines, institutionnelles ou territoriales.
En effet,
les délitements des liens sociaux
ont entrainé des bouleversements d’ordre anthropologique affectant en
profondeur nos repères, nos modes de représentations et de confiances collectives. Les causes sont autant
conjoncturelles que structurelles, liées notamment à :
-
une précarisation grandissante de la société ;
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aux fractures géographiques et numériques creusant les décalages dans les manières de vivre « ensemble »,
entre publics et entre générations ;
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aux modes de reconnaissances collectives, liées à une réussite individuelle effrénée ;
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aux pertes de sens et d’utopies communes ;
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aux dangers terroristes affectant notre sentiment de cohésion et de sécurité collective ;
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à l’arrivée de populations nouvelles en quêtes d’acceptation et d’avenir ;
-
aux catastrophes naturelles face auxquelles l’homme peut se sentir impuissant ;
-
aux chocs de crises sanitaires soudaines et angoissantes, etc…
Les Libres Filmeurs ont alors perçu le rôle majeur des arts dans l’amorti de ces défis. Car ils participent, à
travers leurs capacités d’expression, d’incarnation et de projections, d’un ré-enracinement identitaire de la
personne - physique ou morale – dans le monde qui l’entoure. Ainsi, en s’appuyant sur un usage anthropologique
des médiums artistiques,
il est possible de se reconnecter en ses fondamentaux, de construire et transmettre
une vision globale de la personne ou d‘un évènement traumatique et de refaire sens ou continuité avec un
parcours.
Cette refonte permet alors d’apaiser un sentiment de pertes ou de décalage et de se rendre plus
intelligible auprès de son voisin - enrayant le sentiment d’une fracturation globale de notre contrat social.
C’est pourquoi Les Libres Filmeurs ont expérimenté des cadres artistiques facilitant la mise en représentation
individuelle et collective de leurs apprenants, pour eux-mêmes et leur environnement, que ce soit à travers le
prisme cinématographique, musical, architectural, paysager, plastique, pictural ou théâtral.
Les travaux créatifs
issus de ces ateliers ont été mis en valeur, de manière ponctuelle, lors de premiers espace-temps de
restitution (exposition, festival, salle de cinéma, maisons de quartier, etc…).
La Plateforme AIR (Arts, identités et Résiliences) s’inscrit donc dans une continuité d’actions intuitive, réflexive
et valorisante des œuvres et de leurs auteurs. Le modèle et la méthodologie des ateliers d'éducation aux arts
enclenchent un premier élan de création chez des publics vulnérables, mais restent insuffisants pour maintenir une
continuité résiliente sur le long terme. D’où la nécessité de penser un outil numérique, complémentaire et innovant,
apportant une opportunité de vues sécurisante, tout en encourageant une autonomie progressive dans l’acte de
création.
Parallèlement,
ce nouvel outil numérique incarne une étape dans l’évolution éditoriale des Libres Filmeurs.
Celle-ci naît de l’impact collaboratif entre nouveaux arrivants (jeunes réfugiés) et habitants (figures tutélaires ou
personnes en situation de handicap) des quartiers. L’implication de différents publics dans la création de films
retraçant le parcours de jeunes migrants a créé une empathie communicative par l’appropriation artistique des
ressentis d’autrui, de sa douleur vécue et de sa joie à la surmonter.
Enfin, cette implication a fait naître chez les personnes investies un désir de raconter et de transmettre, à leur tour,
une histoire personnelle. C’est pourquoi Les Libres Filmeurs ont progressivement diversifié leurs publics-cibles et
entériner,
via la création de cette Plateforme, une démarche artistique démocratique, comparative, utile et
résolument tournée vers l’humain.